Dossier Quelle mélangeuse pour demain ? Les constructeurs répondent
Devenue un outil indispensable dans bon nombre d’élevages, la mélangeuse connaît actuellement des évolutions majeures. Gros volumes, automotrice, robot, pailleuse… Quels seront les nouveaux standards d’ici quelques années ?
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Avec leur look de baignoire géante et leurs vis surdimensionnées, elles se sont rapidement fait une place de choix dans le paysage de l’élevage. Les mélangeuses se sont démocratisées à grande vitesse. Et l’offre et le choix des technologies évoluent tout aussi vite ! Les principaux constructeurs du secteur, présents au Sommet de l’élevage de Clermont-Ferrand cet automne, nous donnent leur vision de l’avenir.
Premier enseignement, la mélangeuse à bol a encore de beaux jours devant elle. « Nous avons en France 3 500 clients pour la mélangeuse, une dizaine pour l’automotrice », détaille-t-on par exemple chez Keenan. « Il y a un retour aux sources. On se dirige vers du robot ou du très simple, avec des technologies fiables et largement éprouvées », pronostique Franck Guéry, de Silofarmer.
Le climat rend l’ensilage plus compliqué
« Quand on regarde les immatriculations, la taille du bol a tendance à augmenter », analyse Pierre Grevet, de Lucas G. Selon Pierrick Blanchard, de Kuhn, en 2008, la moyenne était à la 10 m3 en monovis, en 2015 18 m3 à deux vis, et aujourd’hui 24 m3 toujours à deux vis. « Les 30 m3, cela va devenir la norme, prédit Olivier Mompeu, de Jeulin. La fibre demande du volume. En dessous de la Rochelle à Lyon, l’ensilage va devenir compliqué, il va falloir trouver d’autres solutions ». Pierrick Blanchard, chez Kuhn, approuve : « beaucoup d’éleveurs se remettent à des cultures comme la luzerne pour être moins dépendants au soja ».
« C’est la tendance, abonde Jarno Reulink, de Trioliet. Nous montons jusqu’à 52 m3 aujourd’hui ». « Notre créneau, c’est la grosse capacité. Les 14 et 16 m3, on en fait de moins en moins. Si on regarde aux USA, en Allemagne, dans les pays de l’est, ce qui se fait, ce sont les gros volumes. Une automotrice, c’est cher à l’achat et en entretien. Un robot, cela convient maximum aux moyennes structures. Et quand c’est en panne, c’est en panne… Une mélangeuse, c’est simple et ça se répare vite », clame Pierre-Louis Janvier, chez Belair.
Une croissance à deux chiffres pour les automotrices
Les automotrices, moins robustes que le bon vieux bol, ont quand même le vent en poupe. Selon les chiffres des immatriculations, il s’en vend actuellement 150 par an en France, avec une croissance à deux chiffres. « Rien que le mois dernier (septembre 2023), nous avons écoulé quatre MVS 22 Duplomix. L’automotrice se développe énormément en individuel », se félicite Blaise Guillaume, chez Tatoma.
« La mélangeuse de demain, c’est clairement l’automotrice. Pour une raison simple : il n’y a plus de main-d’œuvre dans les exploitations. Pour convaincre, on met l’accent sur la fiabilité. Nous sommes là à la mise en route de la machine. Et nous avons en France 8 000 références de pièces en stock si besoin », raconte Jérôme Guiffard, de RMH. Côté confort, une automotrice, c’est aussi, selon une étude de Kuhn, 11 000 montées et descentes d’engin économisées par an pour les articulations de l’éleveur ou de l’éleveuse.
« Les automotrices sont très adaptées aux Cuma ou aux fermes avec deux sites. Leur prix grimpe jusqu’à 250 000 €. À ce prix-là, selon moi, le robot apporte quand même plus d’avantages. C’est un gain en main-d’œuvre, en flexibilité, et cela permet de faire de petits lots et de réduire la consommation de carburant », nuance Jarno Reulink, qui propose chez Trioliet le Triomatic avec cuisine.
L’élevage déjà habitué à l’automatisation
Car le monde de l’élevage est déjà familiarisé aux robots. 20 % des éleveurs laitiers sont ainsi équipés pour la traite. « Ils sont habitués à l’automatisation. Ils savent que cela fonctionne donc ils ont tendance à franchir le cap plus facilement », constate Pierre Grevet, de Lucas G, qui commercialise l’I-Ron Mix, un système automatisé avec cuisine. « Nous en avons déjà 25 en fonctionnement en France. C’est plus d’ingestion, plus de lait, plus de temps disponible, moins de tracteurs… C’est une nouvelle façon d’appréhender l’exploitation ».
La plupart des constructeurs qui ne se sont pas encore lancés planchent sur le sujet. « Il faudra suivre, surtout si les tracteurs évoluent », confie Laurent Feuillen, chez Robert qui, en attendant, croit fort en son godet désileur BMV, qui offre la même qualité qu’une mélangeuse « à portée de tous ». « L’automatisation, c’est le sens logique de l’évolution, d’autant que nous faisons des cuisines depuis des années », met en avant Blaise Guillaume, chez Tatoma.
Les robots ne sont pour autant pas la panacée. « Il leur faut des allées bétonnées avec un sol bien plat. Et c’est déjà bien adapté pour l’ensilage mais dès qu’il y a des apports de fibres, c’est plus compliqué », note Olivier Mompeu, de Jeulin. « Les robots avec cuisine, c’est un nid à problèmes. Les seuls qui ont un temps d’avance aujourd’hui, c’est Kuhn, il faut le reconnaître », confie un fabricant.
Un robot « du silo à l’auge » chez Kuhn
L’Aura du constructeur alsacien est la seule à aller « du silo à l’auge » sans système de cuisine. Une dizaine fonctionne aujourd’hui en France, avec une production attendue à plus grande échelle courant 2024. Mais même cette prouesse technologique n’a pas réponse à tout. « Nous avons des Italiens qui sont passés sur le stand, ils ont 3 000 vaches : l’Aura n’est pas adaptée pour eux. On est plus sur du 250 vaches », raconte-t-on chez Kuhn.
La mélangeuse de demain sera donc, et avant tout, celle la mieux adaptée à l’exploitation. « J’imagine plus de bols niveau bovin viande, pour le côté naisseur et engraisseur travaillant en foin, et plus de robots au niveau bovin lait, annonce Daniel Guieu, chez Gyrax. Après, chaque cas est particulier. J’ai un agriculteur qui voulait absolument un gros bol. Il ne passait que dans deux de ses bâtiments sur trois. Il a dû prendre plus petit. Il était déçu mais il n’avait pas le choix ».
Sans oublier les mélangeuses pailleuses, qui représentent aujourd’hui une vente sur deux en France. « Dans le fond, comme aucune ferme ne ressemble à une autre, l’avenir de la mélangeuse, il se décide lors de la visite chez le client », conclut Franck Guéry.
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